Enquête sous haute tension dans l’Italie de Mussolini par Michel Chevallier

Enquête sous haute tension dans l’Italie de Mussolini par Michel Chevallier

Le tout premier roman fictif de Michel Chevallier s’intitule Rome est une femme. L’ouvrage a été publié aux éditions de l’Harmattan. Leur catalogue très éclectique témoigne d’une volonté de diffuser des livres de tous bords, qui participent à la vie du livre en France.

Dans cette histoire palpitante et terrifiante de réalisme, le lecteur s’embarque dans une enquête atypique. En quelques pages seulement, le personnage principal découvre le corps de la victime, laissée nue sur une plage. Qui est-elle et pourquoi l’a-t-on tuée ? C’est là tout le cœur de ce récit où chaque détail compte. À la manière d’une immense toile d’araignée, les connexions se font petit à petit. Comme le roman est une introspection, le lecteur se faufile dans l’esprit d’un enquêteur inexpérimenté, en la personne de Cesare. Puceau et élevé dans une famille modeste, le jeune homme doit faire ses preuves auprès de son supérieur Gaetano. Dans une Italie aux mains du dictateur Benito Mussolini, appelé « GM » par le commissaire. Celui qu’il prend pour un père de substitution est suffisamment malin pour détourner les pièges de la propagande. Esprit indépendant et manipulateur lorsqu’il faut, les deux policiers suscitent la sympathie. Dans ce roman composé à la manière d’un mille-feuille, chaque sujet se superpose parfaitement. Malgré la découverte terrible d’un cadavre sauvagement abimé, le protagoniste ne peut s’empêcher de s’y attacher, d’une manière maladive. En quittant l’enfance, Cesare se forge une personnalité plus osée et courageuse… Mais est-ce vraiment l’attitude à adopter, lorsque l’on vit dans un État totalitaire et soumis aux caprices d’un homme qui se considère comme un dieu ?

            Lors de la découverte de Rome est une femme — le lecteur passera par de nombreux états d’âme et émotions toutes plus vives et intenses, les unes que les autres. Plutôt que de mettre l’accent sur la résolution de l’enquête (qui prend son temps), l’auteur traite minutieusement la personnalité de ses personnages. Certains sont des pions du régime : ils ne réfléchissent pas, ils suivent les ordres avec l’espoir d’être récompensés. D’autres craignent pour eux et pour leurs vies, pour leurs familles. Enfin, les résistants œuvrent en silence, car recherchés. Au fil de l’enquête, Cesare et son chef rencontrent des personnages qui frôlent avec le domaine des ombres et l’occulte. Des thèmes et des sujets qui se fondent à la perfection dans une affaire de meurtre. En effet, le public friand de cas criminels aime ce lien étroit entre mort, sexe et rituels. Ce mysticisme a même donné lieu à des croyances très marquées dans les années 80, un phénomène également connu sous le nom de « Satanic panic » — qui a éclaté aux États-Unis. Des complots qui inspirent fortement la fiction et qui donnent de nombreuses idées aux romanciers !

Mais qui a tué Vantona Vizzi ? Dans ce journal intime où l’on assiste au parcours chaotique de l’enquêteur, il est question d’audace et de courage. Jusqu’où sera-t-il prêt à aller, pour élucider une énigme ? Alors que la police d’Ostia classe l’affaire comme résolue, Cesare et son chef ne semblent pas séduits à l’idée de tomber aussi bas. Malgré le danger encouru, le jeu en vaut peut-être la chandelle. Mais les découvertes qu’ils risquent d’éveiller pourraient entraîner des répercussions terribles sur leurs propres existences…

Dans une immersion étouffante, où le suspense est de plus en plus marqué, l’auteur réussit à tenir en haleine sa cible. Dès la première page et ce, jusqu’à la dernière, le lecteur ignore où il se laisse balader. Dans un pays guidé par la loi du silence, largement présente dans la mafia — il est très dangereux de se détacher de la masse. Les êtres différents tels les personnages de Cesare et son chef Gaetano sont traités comme des parias. Vont-ils être découverts, alors qu’ils tentent de rendre justice à cette femme, qui a subi un calvaire avant d’expirer ?

En définitive, Michel Chevallier a su créer une fresque haletante et aux virages à 360 °C. Le résultat se présente sous la forme d’un roman vivant, où les dialogues ne manquent pas de saveur. Le lecteur parvient à s’imaginer parfaitement les scènes ainsi que les lieux emblématiques de la ville italienne, si « romantique » — cachant des secrets aussi beaux que terrifiants. Cette lecture immersive permet également d’en apprendre plus sur l’Italie autoritaire. Dans l’océan de fictions historiques, il est malheureusement rare de croiser le chemin d’un thriller autour d’une Rome en proie au fascisme des années 30. Une découverte différente et marquante, placée sous le signe du suspense à l’état pur.

Le site de l’auteur : http://michel-chevallier.com/